Respect et reconnaissance

Et bien voilà, c’est fait. Nous vivons un événement exceptionnel que nos générations n’ont plus connu depuis la dernière guerre mondiale. Seuls nos anciens et encore faut-il qu’ils y aient plus de nonante ans se sont réveillés un matin avec un ordre de mobilisation de l’armée et de la protection civile. Un ordre de mobilisation effectif, pas un exercice. Cela semblait irréel.

Les jeunes recrues et soldats tout particulièrement de la brigade sanitaire l’ont vécu en première ligne pour servir leur pays. Servir, un mot galvaudé, souvent moqué, mais là, c’était du sérieux, il avait tout son sens. Il fallait aider les hôpitaux à tenir le coup, mettre en place dans l’urgence des lieux éphémères équipés pour une éventuelle surcharge hospitalière qui finalement n’a pas eu lieu. Soulagement. Mais l’engagement était bien là, des militaires sanitaires dans les centres de soin pour pallier au manque de personnel. Ils ont tous une formation de soin reconnue. Des jeunes hommes de la protection civile au service de la gestion des infrastructures, en charge de coordonner les informations et les besoins entre la société civile et les autorités. Les choses se calment aujourd’hui mais l’événement restera dans les mémoires à jamais de ces 3000 jeunes gens et de leurs familles. Ils ont été utiles et ils le savent.

Le confinement exigé par nos autorités aura pour beaucoup remis l’église au milieu du village. La mort si souvent cachée, (qui dans la population, a déjà vu un mort d’ailleurs, en vrai…), la mort est soudainement apparue comme une réalité effrayante. Pas pour un petit bobo ou un chute de surf mais une maladie inconnue qui tue au hasard… On se rend compte que la famille, les amis, c’est important. On se dit soudain qu’on a un peu oublié d’appeler grand-maman, que les visites à l’EMS, on aurait pu faire plus. Et là, on voudrait bien les visiter, les embrasser mais on ne peut pas…

On se rend compte aussi que notre lieu de vie peut changer la vie justement. Tout le monde s’est mis à ranger, nettoyer pour se sentir mieux. Un confinement, ce n’est pas comme les vacances. Alors se nourrir deviendra la préoccupation de chacun. Ceux qui sont allés dévaliser les rayons des magasins par peur de manquer, ceux qui ont fait appel aux livraisons de toutes sortes auprès des petits commerçants locaux qui ont été très inventifs pour raccourcir le réseau de distribution. On s’est tous mis à manger sain, frais, local, fait maison. S’est manifesté un besoin de partager ses repas sur les réseaux sociaux pour rester en lien sur un sujet de la vie essentielle. Sans oublier aussi les photos postées quotidiennement sur la nature qui éclot et s’épanouit comme jamais. Que les arbres en fleurs, les fleurs de saison, les tulipes, colorées ont donné du baume au cœur. Les magasins de fleurs, les garden center sont devenus, qui l’aurait imaginé, des magasins de première nécessité. Ils vont rouvrir en premier d’ailleurs avec les coiffeurs.

Ce confinement imposé aura montré aussi la créativité des nombreux entrepreneurs des trois secteurs économiques et l’engagement de tous ceux qui ont travaillé dans cette logistique indispensable au pays. Il fallait nourrir la population, produire les produits indispensables à la gestion sanitaire et le home office aura pu assurer une continuité administrative un peu partout. Il y a eu des râtés, c’est sûr mais l’innovation, la solidarité, la réactivité du tissu économique et de l’Etat auront montré qu’une crise peut se surmonter. Merci surtout à tous ces employés de la logistique qui ont accepté le danger pour le bien-être de tous. Il nous faut aujourd’hui « déconfiner » avec intelligence et par étape comme l’a proposé le Conseil fédéral. Mais le travail est devant nous. Tout le monde en est conscient…

Paru dans TRIBUNe d'avril 2020