Les ingrédients d'une bonne recette budgétaire
- Fabienne Guignard
- 11 oct. 2019
- 3 min de lecture

LES TAXES, TOUT EST DANS LE DOSAGE...
S’il y a bien une chose que les citoyens détestent, ce sont les taxes. Qui peut le leur reprocher. Il y en a toujours une nouvelle, qui bien sûr a une justification tout à fait raisonnable. Il n’en demeure pas moins que leur nombre augmente régulièrement sans pour autant en supprimer d’anciennes. Le contribuable a ainsi l’impression (bien réelle) d’être ponctionné en permanence pour tout et pour rien. Mais peut-on vraiment faire autrement ? Quand on est PLR, on cherche toujours à diminuer l’impact de ces hausses d’impôts indirects mais le réalisme budgétaire est parfois plus fort que la volonté partisane…
Le concept du "pollueur-payeur" accepté en votation populaire pour la gestion des déchets a fait légion. C’est ainsi que l’on a vu apparaître d’autres formes de financement identique sur des produits de premières nécessité gérés par les pouvoirs publics, en l’occurrence la gestion de l’eau. En résumé, nous payons une taxe annuelle qui donne droit à l’accès aux infrastructures (déchetterie , moloks, canalisations, etc) et une taxe bis qui sanctionne la consommation (taxe au sac, etc). On parle aujourd’hui d’une taxe sur l’électricité qui suscite maintes oppositions. Une taxe certainement nécessaire pour répondre aux exigences et mesures annoncées afin de lutter contre le réchauffement climatique, avec une finalité, diminuer de 60% la consommation d’énergie par habitant d’ici 2050. Bonne nouvelle à long terme mais moins bonne à court terme. C’est bien le problème…
Les taxes sur les produits et services de nécessité ou de luxe servent à financer des actions publiques que les impôts traditionnels ne couvrent pas. Ce type d’impôt subsidiaire existe depuis la nuit des temps : taxes douanières, taxe sur les alcools comme le rhum, les produits exotiques tels que le sucre, la mélasse qui ont donné lieu à des colères populaires, voire des révolutions. Le Sugar Act , par exemple, sera la cause de la Guerre d’indépendance américaine. En France l’impôt sur le sel était très impopulaire, c’est le moins que l’on puisse dire. Vinrent ensuite l’impôt sur les Portes et Fenêtres, sur les Parcs et Jardins. A chaque époque ses critères nouveaux. La Révolution américaine a vu la taxe à l’importation de coton doper la culture du coton justement. Benjamin Franklin, un des pères fondateurs estimait que "tout ce qui est inutile à la survie de l'individu et de sa descendance, appartient en priorité à l'Etat". Pas très libéral…
En Suisse, dès 1916, la dîme a été remplacée par des prélèvements plus modernes et des taxes sur les produits de luxe et les boissons. Les taxes actuelles sur l’essence, le tabac sont aujourd’hui des sources importantes de revenus pour la Confédération pour financer infrastructures de communication et AVS. Des revenus indispensables. Mais toujours pas de taxe sur le kérosène sur le plan mondial. Une décision politique prise à l’issue de la deuxième guerre mondiale pour favoriser l’essor d’une industrie naissante, l’aviation civile. Septante ans plus tard, le lobby concerné comme celui des armes aux USA ou du transport maritime, met tout son poids pour garantir le statu quo. Franchement, à l’heure des vols , pour le plaisir ou pour le business, un impôt sur le kérosène serait un impôt juste, moderne et adapté à la situation environnementale et climatique actuelle. Les taxes sur les billets d’avion semblent heureusement acceptables par une majorité des usagers mais l’effet financier est bien moindre. Les taxes resteront toujours un outil budgétaire indispensable des Etats. Mais attention, à utiliser avec intelligence et modération. L’histoire a montré qu’une taxe juste et équitable est acceptée par la population. Pour cela une seule condition, ne pas mettre en danger la cohésion sociale en évitant d’accroître les inégalités. Quand cette cohésion n’est plus assurée, les conflits politiques et sociaux s’installent et là c’est l’inconnu… Les Etats qui ne le comprennent pas le paieront cher dans les rues et dans les urnes… Les taxes, un outil utile mais délicat à manier… Tout est dans le dosage et les contre-mesures pour soulager les plus faibles.
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