Quand les religions veulent mener le monde
- Fabienne Guignard
- 28 juil. 2016
- 5 min de lecture

Impossible aujourd’hui de faire l’impasse sur la recrudescence du religieux dans nos sociétés occidentales sous peine d’être accusée de déni de réalité. Je m’en voudrais bien. Que les pays musulmans particulièrement y fassent recours plus souvent qu’à notre tour est dans leur tradition culturelle et cultuelle où le fait religieux passe avant l’état de droit, mieux il régit leurs règles sociétales. On obéit à Dieu avant d’obéir à la loi. Ce n’est pas le cas chez nous. Ou plus exactement ce n’est plus le cas.
"La laïcité,
un des grands bienfaits pour l'humanité,
surtout pour la condition de la femme"
Depuis plus d’un siècle, les sociétés européennes, notamment, ont cherché à se libérer de l’emprise des dogmes et pratiques religieux dans leur mode de vie, de chacun, hommes et femmes, laissant se développer une liberté d’agir, de se vêtir, sans couvre-chef, mieux de gérer son corps à sa guise y compris les naissances, que nos ancêtres n’avaient pas connue mais si longtemps rêvée. Avec comme corollaire il vrai, une désertion des lieux de cultes. La laïcité a passé par là. Et c’est tant mieux. Voilà bien un des grands bienfaits pour l’humanité et surtout pour la condition féminine.
Quand la religion, quelle qu’elle soit, refait surface avec force, la femme n’est-elle pas toujours le dindon de la farce ? Une injustice semble-t-il récurrente qui montre clairement que le mâle, depuis la nuit des temps, a toujours cherché à manifester son autorité, sa supériorité sur le genre féminin. L’arrivée des suffragettes au début du siècle dernier a fait avancer à grands pas l’indépendance de la femme même s’il aura fallu attendre la fin du XXème siècle pour voir appliquer dans la loi l’égalité des sexes. Et Dieu sait qu’on en est encore loin. Tiens encore lui…
Mon propos n’est pas ici de condamner la foi que chacun peut avoir mais bien de redire haut et fort que le principe même de la démocratie comme valeur fondamentale se défend de mettre les individus autrement que sur un pied d’égalité. Aujourd’hui, cette neutralité des sexes assurée par une laïcité prônée et acceptée de tous est de plus en plus remise en question. Parfois de manière insidieuse et sous couvert de bons principes moraux. Ils ont bon dos… Et peu importe que l’on soit catholique, protestant, anglican, orthodoxe, juif, mormon ou évangéliste. A chacun ses tolérances bien fragiles sur la position de la femme dans la société. Dans tous les cas, la femme n’est jamais au centre des priorités sauf quand il s’agit de la soumettre mais toujours pour son bien…. Un peu naïvement peut-être avions-nous crû que les progrès en la matière étaient définitivement acquis. On le voit bien, ce n’est pas le cas. A quand les nouveaux mouvements féministes ?
"Le droit à la vie vient de jour en jour
mettre en danger le droit à l'avortement
acquis de haute lutte"
Mais rien n’est jamais ni blanc ni noir. Un monde paradoxal s’offre à nous. Les femmes « libérées » ne sont-elles pas en train de redevenir des femmes objets, sous une autre forme. On pénalise les clients des prostituées mais on utilise des gamines de 15 ans, que l’on met à la diète, pour les transformer en cintres ambulants dans les défilés de mode. Pas de problème, c’est pour embellir la femme… Le droit à la vie vient de jour en jour mettre en danger le droit à l’avortement, acquis de haute lutte. Il y a même en Europe, en France, des femmes qui doivent se cacher pour subir un IVG, le médecin, insulté pour ne pas dire plus… Le pire, c’est que se sont généralement des femmes qui montent au créneau avec le plus de violence, dans les propos comme dans les actes. Je n’ose pas parler des Etats-Unis, pays bigot par excellence qui met la morale au-dessus de tout, où l’argent est roi, au même titre que Dieu, mieux en son nom…
L’islam vient maintenant à pointer sérieusement son nez en Occident et avec lui des pratiques que nous n’acceptons pas. Tiens bizarre, il y est aussi question de la femme. Voilée, plus ou moins selon que l’on soit Iranienne, Saoudienne ou Afghane. Mais voilée tout de même et de plus en plus. Rappelez-vous les hauts cris de la population suisse lorsque la conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey avait porté le voile en Iran pour discuter avec le premier ministre de l’époque. Le port du voile est décidément un symbole d’une importance capitale. Pas de problème s’il est volontaire mais problème s’il est imposé par l’homme de la famille. Qui peut savoir ? La femme contrainte osera-t-elle le dire ? Bien sûr que non. Quelle hypocrisie !
"Le religieux n'a pas à édicter les règles
du vivre ensemble"
L’Etat islamique, et les djihadistes européens qui le rejoignent, poussent l’importance du fait religieux à son extrême limite allant jusqu’à prôner le chaos total, les supplices, la mort et la destruction de la civilisation y compris la leur. Alors, cet islamisme-là, promu par un salafisme obscurantiste justifiant tous excès et exactions, est bien présent dans les mosquées occidentales. Au nom de la religion, certains fanatiques sur notre territoire refusent que des médecins hommes soignent des femmes, demande que les cours de piscine ne soient plus mixtes ou pire que les femmes doivent se baigner habillées.
Le politiquement correcte a longtemps interdit les propos visant à exclure certaines pratiques contraires à nos valeurs occidentales, mais peut-être est-il temps que la laïcité, dans tous ses aspects, reprennent ses droits. Le religieux n’a pas à édicter les règles du vivre ensemble. Ceux qui ne veulent pas s’y soumettre, et ils en n’ont parfaitement le droit, n’ont pas à trouver une place dans nos sociétés ouvertes et tolérantes.
Il n’y a pas un jour sans que des dérapages culturels ne soient mis au jour donnant aux partis d’extrême droite des occasions de manifester leurs hostilités vis-à-vis des étrangers. Trop facile. C’est justement parce que le religieux s’est engouffré dans la vie sociétale et dans l’espace public que ces heurts se manifestent. Les réfugiés majoritairement musulmans sont ainsi injustement accusés de venir empoisonner notre civilisation ouverte et libre. Attention aux amalgames mais il est sûr qu’une formation approfondie pour assurer une intégration réussie de ces personnes demandant protection doit être une priorité des autorités. La femme restant toujours l’enjeu principal de nos différences. Oui, on doit leur dire clairement quelles sont nos valeurs sur lesquelles il n’y a pas à discuter. Et comme dans tout « deal », il y a des critères à respecter. Celui de l’égalité homme femme en est une.
"On répugne à parler
de guerres de civilisation, de religion.
Elles sont pourtant le fait de l'Histoire"
Mais le pouvoir de la religion est aussi dans le camp de la civilisation européenne. Certains pays encore fortement sous l’emprise de leur église, en Hongrie, en Pologne, en Grèce, en Italie, en Amérique du Sud, en Afrique par exemple, sans parler des Etats-Unis ne peuvent pas d’un coup de baguette magique changer leur logiciel de pensées et de croyances. Mais sans conteste, les crises identitaires auxquelles nous sommes confrontés exacerbent les passions guerrières, dans tous les camps. On répugne à parler de guerres de civilisation, de religion. Elles sont pourtant le fait de l’Histoire. L’Homme a beaucoup tué au nom de Dieu. Pourquoi faudrait-il que cela change d’un coup ? L’accès à l’éducation, aux livres d’histoire devrait nous rappeler les méfaits des guerres religieuses. Des guerres tout court. Un peu de culture que diable… Alors si nous étions si intelligents, nous saurions les éviter. Mais le sommes-nous assez ? On peut en douter et pourtant il faut l’appeler de nos vœux, de tout notre cœur. Et si on priait ensemble, juste pour le bien de l’humanité… Cela s’appelle l’œcuménisme…
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